Uma amizade

En ces temps de visages masqués, je me suis rendue compte de plusieurs choses : bien que je ne souffre pas de prosopagnosie comme l’héroïne de mon dernier livre audio, ma capacité de reconnaitre les visages masqués est très limitée, surtout hors contexte (j’ai croisé la bibliothéquaire dans la rue et je ne savais pas qui elle était!). Aussi, au-delà du défi auditif (masque + écran de plexiglas), je pense qu’à certains degrés en temps normal nous lisons tous sur les lèvres des autres. Nous ne vivons pas un temps normal, donc je ne comprend pas la moitié de ce que les gens me disent. Ça m’énerve ! Je n’ose même pas imaginer la difficulté et l’isolation que doivent ressentir les gens sourds qui dépendent vraiment de pouvoir lire sur les lèvres pour naviguer en société.

La solitude ne m’a jamais dérangé. Après tout, en grandissant ma mère passait souvent des après-midis entiers à dessiner, mon père s’enfermait dans son bureau pour travailler, j’ai toujours aimé lire, et j’ai aussi passé des années à pratiquer le piano ou le chant. Toutes des activités solitaires. Mais je me rend compte que je vis mieux ces périodes de solitude quand je peux les entrecouper d’épisodes de communication “intense”. La sociabilité n’est pas seulement la capacité de pouvoir discuter ou faire la fête avec des amis, on ne communique pas seulement avec des mots. Le language corporel exprime plus que de simples paroles. (D’où l’importance de l’art dans nos vies, sans quoi on se prive d’une grande partie de notre humanité !) Quand on se prive de la moitié du visage de son interlocuteur, on se prive de la moitié de la conversation. J’ai ressentit un grand malaise quand, après plusieurs mois de fermeture, je suis enfin retournée à la bibliothèque du quartier. Tout le monde était, bien-entendu, masqué. La convivialité habituelle avait disparu pour donner place à des phrases courtes, fonctionelles. Je me suis sentie comme un zombie, inhumaine, robotique… Je suis vite repartie parce que ça m’a donné un coup de déprime ! (de toutes manières ils ont enlevé les tables, chaises et fauteuils: on ne peut plus rester bouquiner !)

Heureusement que j’ai une nouvelle amie qui est apparue dans ma vie au bon moment ! C’est un début d’histoire super sympa.

Pendant le mois d’août, alors que je visitais le parc à splash pad avec les enfants, ce jour-là il faisait une chaleur écrasante et pour me rafraîchir je disais aux enfants de se mettre à courir vers les jets d’eau avec moi pour que je n’ai pas l’air (trop) folle toute seule. Il n’y avait presque personne. Je m’en fous un peu de ce que “les autres” pensent, mais c’était surtout une excuse pour qu’ils bougent leurs fesses au lieu de lire leurs BDs (pas que ça me dérange qu’ils lisent, mais on ne va pas jusqu’au parc pour rester cloués autour de la table à pique-nique !). Bref. Nous étions au parc et je me rafraîchissais allègrement aux jets d’eau en observant les autres humains autour de nous (en période de post-confinement, j’avais une soif particulière de voir les gens en vrai). Ça faisait quelques fois que je remarquais une autre maman avec ces enfants (plus petits que les miens) et je ne sais pas pourquoi mais je me disais qu’elle avait l’air brésilienne… Alors discrètement je me dirigeais dans sa direction et j’essayais de l’écouter parler avec ses enfants pour déterminer si elle parlait portugais ou espagnol. “Par hasard”, on s’est retrouvé côte à côte, on se regarde, on se sourit et elle me demande si je suis brésilienne ! Ha ha !

En fait, c’était pas creepy du tout hein, elle faisait la même chose que moi ! 😆

Un gros orage d’été a soudainement éclaté 5 minutes plus tard, alors on n’a pas pû trop discuter ce jour-là, mais avant que l’on se mette à courir dans tous les sens sous le déluge, elle m’a tendu ses coordonnées chiffonnées sur un bout de papier…. No way, elle habite dans un appartement juste en face de chez moi ! Trop chouette: une voisine brésilienne avec qui je peux continuer à papoter en portugais !

Après quelques échanges, j’apprend qu’elle et son mari (qui s’appelle D comme le mien !) ont habité quelques années en Allemagne avant de venir ici. Ils sont arrivé au Canada au mois de janvier cette année, les pauvres ! À cause de la crise sanitaire, ils se sont retrouvés dans une situation financière bien difficile. Ils avaient prévu des économies pour les quelques mois d’études du mari avant qu’il ne puisse trouver un stage payé (intership), mais comme la majorité de la planète, études (pour lui) et recherche d’emploi (pour elle) ont été suspendues pendant plus de 6 mois…

Et puis j’apprend qu’ils n’ont ni permis, ni voiture, quelle galère pour le supermarché ! Donc je lui ai proposé de m’accompagner quand j’y vais. Une fois par semaine, je lui envoi un message quand je m’apprête à aller faire les courses et nous y allons ensemble. Elle dit ne pas savoir comment me remercier, mais franchement sa companie me rend la corvée d’aller faire des commissions infiniment plus agréable. Surtout qu’au-delà de l’absurdité de la situation mondiale, il est déjà tellement difficile de se faire des nouveaux amis quand on est adultes, un peu nomades, dans une nouvelle ville, un nouveau pays, et avec des enfants ! Nos précieuses sorties hebdomadaires, nos discutions, nos rigolades sont un baume au coeur en ces temps amers.

Je vous laisse avec des extraits musicaux d’une autre de mes obsessions musicales de ces derniers mois (en plus de la flûte à bec) la vielle à roue ! Si la vielle était aussi abordable que la flûte à bec, j’en aurai déjà acheté une, mais malheureusement (ou heureusement pour les oreilles de ma famille et les voisins, ha ha!) il n’y a pas de luthier de vielle à roue en Amérique du Nord, il y a des listes d’attente de plusieurs mois (parfois plus d’un an!) chez les luthier européens, et, en plus, nous avons zéro budget (pour un tel bijou superflu) pour l’instant (il faut compter au-delà de $1000 pour un bon instrument de base)… Mais ce son m’enchante ! Et quel instrument magnifique ! J’adore !

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8 comentários sobre “Uma amizade

  1. C’est vraiment une histoire sympa qui réchauffe le coeur! L’une de ces rencontres improbables qui te fait croire en l’humanité 🙂

    Ce n’est pas juste toi, j’ai de bonnes oreilles, mais j’ai abandonné l’idée du “small talk” avec un masque, par exemple dans les magasins. C’est dommage, parce que finalement ce sont tous ces petits moments avec les inconnus qui donnent du sens à la vie en communauté aussi. Mais heureusement, j’ai aussi vu plus de monde que d’habitude paradoxalement (distance de sécurité et tout respectées, bla bla bla) avec les copines désoeuvrées et esseulées.

  2. Quand je parle à des inconnus, j’ai l’impression de porter mon masque sur les oreilles. Déjà que parler à des inconnus me stresse mais là, en plus, je ne comprends rien c’est un cauchemar.
    Quant aux amitiés une fois adulte, c’est vrai que c’est bien plus difficile. On peut se voir lors d’une activité commune et retourner chacun à sa vie pour ne se retrouver et échanger que lors de cette fameuse activité. C’est dur. Donc, c’est chouette que tu aies réussi à te faire une nouvelle amie.

    • Surtout que quand t’es adulte tu as déjà un trajet de vie plus compliqué, des avis plus confirmés, et trouver des points communs est parfois plus difficile. Mais là, l’adaptation dans un nouveau pays on connait… C’est une amitié née dans la difficulté 🙂

  3. Alors là je te rassure, je ne comprends plus RIEN quand les gens masqués me parlent! Tu as de la chance d’avoir une nouvelle amie et elle a aussi de la chance de t’avoir 🙂 Ici, je ne peux même plus voir mes (vieux) amis et tout le monde se méfie de tout le monde, comme si on avait tous la peste, et c’est pas dans ces conditions-là que je pourrais me trouver de nouveaux amis, hélas.

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